mardi 14 janvier 2014

Changement de climat (politique) nécessaire

En temps que membre et ancien candidat du Parti vert du Québec et du Parti vert du Canada, j'en ai entendu de plusieurs couleurs.

Une des choses plus courantes que j'ai entendues, c'était quand je faisais le porte-à-porte en soirée pour aller chercher les nombreuses signatures. Cet exercice se faisait généralement entre mon retour du travail (vers 18h) et 20h30. Occasionnellement, un adulte assez jeune blaguait que le Part vert faisait particulièrement référence au cannabis.

Mais un sujet que je n'observais que dans les médias, c'est bien sûr la question des changements climatiques. En temps que membre des partis verts, c'est clair que je baigne dans la lutte contre les changements climatiques.

Même si cette lutte est entièrement justifiée, les groupes environnementaux (incluant, dans les années précédentes, certains partis verts), dans un contexte médiatique très saturé, ont décidé d'adopter une stratégie médiatique qui rappelle la fable d'Ésope nommée Le garçon qui criait au loup. Cette stratégie a été abusée au fil des ans au point que peu de gens prennent l'environnement assez sérieusement pour en faire un enjeu politique définitivement prioritaire. Cela mène des chroniqueurs à traiter la très grande majorité de scientifiques d'« alarmistes de climat ».

Le problème auquel fait face le mouvement environnementaliste, c'est que les arguments scientifiques, si justifiés soient-ils, ne tiendront jamais contre les barrages de désinformations. De plus, il y a toujours les facteurs de l'impact immédiat insuffisant sur les individus. On peut imaginer les réponses que l'on a déjà sûrement tous entendues:
  • « Il fait déjà si froid au Canada, ça ne ferait pas du mal, un peu de réchauffement. »
  • « Ça ne m'affectera pas lors de ma vie.  Autant profiter de mon gros char polluant. »
  • « Il fait -25C aujourd'hui.  C'est clair qu'il n'y a aucun réchauffement climatique. »
Évidemment, les changement climatiques (et on parle ici du réchauffement planétaire dû aux émissions de gaz à effet de serre (GES) causées par l'activité humaine) ne sont qu'un symptôme de l'industrialisation, qui n'a pu avoir lieu que grâce à l'usage de combustibles fossiles, dont surtout le charbon, le pétrole et le gaz naturel.

Et voilà où j'en viens: les combats politiques devraient passer leur temps à toucher la source du problème, les combustibles fossiles, un réel enjeu géopolitique imminent, au lieu de se concentrer sur le symptôme visiblement bénin que sont les émissions des GES.

Et alors qu'un pays comme le Canada avec ses nombreuses réserves de combustibles fossiles n'est pas nécessairement le premier endroit à être affecté, le facteur primaire, le Pic de Hubbert, est inévitable et imposera une réduction de la disponibilité de ces combustibles dans les années qui viennent.

Donc, alors que l'augmentation des émissions de GES et leurs impacts sont certainement inévitables, cela devrait importer peu quant à la direction que nous devrions prendre collectivement par rapport aux combustibles fossiles. Puisque la production pétrolière ne peut pas, en soi, adéquatement combler l'usage canadien (et que même si elle pouvait, comme toute production, elle décline après un certain nombre d'années), et qu'une réduction de sa disponibilité comprend des conséquences économiques, la meilleure idée est de réduire notre dépendance du pétrole plus vite que sa disponibilité mondiale chute.

Selon moi, tous les partis politiques devraient mettre emphase sur l'élimination, autant que possible, de l'usage des combustibles fossiles. Cela devrait comporter deux volets principaux:
  • Rendre la production et l'usage des combustibles fossiles moins rentable avec une taxe sur les émissions des 700 grands émetteurs canadiens de GES (cette suggestion ressort du programme du Parti vert du Canada);
  • Mettre en place les programmes et politiques nécessaires pour ne plus dépendre des sources d'énergies fossiles. Cela consiste en fait de plusieurs approches en parallèle car il y a transport, agriculture, construction, etc.
Notons que ce n'est pas seulement une question de changer d'énergies fossiles à des énergies renouvelables. Il y a une bonne raison que le pétrole et ses dérivés (les hydrocarbures liquides) n'ont pas été remplacés par l'énergie nucléaire tel qu'il avait été entrevu avant les années 1980. Les hydrocarbures liquides sont simplement trop pratiques, portatifs et encore trop peu chers pour définitivement laisser leur place à des alternatives.

Mais il y aussi le fait que la façon dont les infrastructures nord-américaines ont été développées garantit notre dépendance aux véhicules personnels et ne permet pas un transport en commun dont les revenus couvrent ses dépenses. La grande taille des maisons et la distance entre elles dans de grands quartiers résidentiels où les déplacements à pied sont irréalistes pour la plupart des résidents, et des autobus municipaux dont la fréquence horaire fait perdre d'innombrables heures aux passagers, voilà des investissements dans des infrastructures qui nous endettes d'une façon particulières: notre futur usage exagéré de carburant pour se déplacer (voir les livres de James Howard Kunstler, dont The Geography of Nowhere), alors qu'il aurait fallu déjà réduit notre consommation depuis des décennies si on voulait pouvoir s'adapter sans conséquences négatives significatives sur le mode de vie nord-américain (voir le rapport Hirsch).

Effectivement, surtout en Amérique du Nord, nous sommes déjà pris avec les conséquences des décisions prises il y a longtemps. L'augmentation de la concentration de bioxyde de carbone dans l'atmosphère et l'augmentation de la température moyenne de la planète est inévitable peu importe ce que nous faisons, mais nous pouvons et devons faire le nécessaire pour réduire aussi tôt que possible notre consommation de combustibles fossiles.

Les avantages économiques et sociaux y sont évidents:
  • Réduction des importations de combustibles fossiles = garder la richesse chez nous;
  • Réduction de l'usage des combustibles fossiles = réduction des émissions polluantes;
  • Des villes plus compactes = une population en plus grande santé;
  • Élimination de notre dépendance aux combustibles fossiles = être prêts au monde post-pétrolier.
Il faut d'abord se rendre à l'évidence qu'une transition pour s'éloigner des combustibles fossiles est à notre avantage, mais il faut surtout se rappeler que cette transition est inévitable. Si nous ne réduisons pas notre usage volontairement, ce « choix » nous sera simplement imposé quelques années plus tard, à plus grand coût.

Il serait bien mieux d'être prêts bien en avance pour éviter un sale ajustement.

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